Le burn-out n’arrive pas qu’aux autres

Le burn-out, tout le monde en a entendu parler, mais peu de gens savent réellement de quoi il s’agit. Combien en parlent à la légère comme s’il s’agissait d’un simple creux de vague, d’un petit accident de parcours après lequel on repart en pleine forme ? Et combien croient qu’ils peuvent “tirer sur la corde” encore un peu plus longtemps, ignorant les signes d’alerte ? Le meilleur moyen de s’en prémunir, c’est encore de se rappeler que cela n’arrive pas qu’aux autres.

Qu’est-ce que le burn-out ?

Sous sa forme première et la plus courante, c’est un syndrome d’épuisement à la fois psychique et physique qui trouve sa source dans l’inadéquation entre une personne et les conditions d’exercice de son travail. Il peut déboucher sur un retrait émotionnel, une déshumanisation des relations, et en dernier lieu sur un profond sentiment d’échec affectant la motivation et la confiance en soi.

Difficile pourtant de résumer avec ces quelques mots la gravité et la multiplicité des symptômes. Car chacune de ces étapes cache un véritable cortège de souffrances qui traverse toutes les strates de l’individu : son corps, ses émotions, son intellect, ses relations avec les autres, le sens qu’il donne à sa vie…

Le burn-out, c’est bien plus que le ras-le-bol de l’employé sous pression, ou le coup de fatigue occasionnel après une semaine chargée. Et surtout, il présente le danger d’être insidieux. L’accumulation dans le temps de petits efforts jugés anodins si on les prend un par un, puise peu à peu dans nos ressources jusqu’à ce que celles-ci soient réduites à néant. Et malheureusement, c’est souvent lorsque l’on a dépassé ses limites que l’on prend la mesure du problème.

Un risque à prendre au sérieux

Le burn-out n’a rien d’anecdotique. Ce n’est pas un caillou sur lequel on trébuche. Plutôt un rouleau-compresseur qui nous passe dessus sans que l’on comprenne d’où il a surgi. C’est cette commerciale qui sort de son bureau après un entretien avec son patron et qui se met à errer dans la rue sans savoir où elle est ni ce qu’elle fait là. C’est cette cadre « battante », modèle de réussite dans son entreprise, qui s’évanouit soudain dans le métro entre deux rendez-vous et ne peut plus se relever. C’est ce responsable comptable d’association qui se retrouve en arrêt de travail, privé d’une partie de ses facultés intellectuelles, et qui peine pendant des mois à retrouver peu à peu des capacités de mémoire et de réflexion normales. Comme si le corps et le cerveau avaient « grillé » leurs batteries. Ces cas-là sont bien plus courants que les suicides au travail qui font exceptionnellement la “une” des journaux.

Aucun d’eux ne l’a vu venir. Ils étaient des professionnels dynamiques, engagés, courageux, le genre « qui tient bon ». Au point de ne pas entendre, ou reconnaître, les signaux d’alarme. Fatigue persistante, difficultés d’attention, douleurs musculo-squelettiques, irritabilité voire cynisme… et tant d’autres symptômes « minimisés », rationalisés ou simplement ignorés. On utilise pour décrire ce phénomène l’analogie d’une grenouille au contact de l’eau bouillante : si on jette de l’eau bouillante sur une grenouille de manière subite, elle s’enfuit, mais si on la plonge dans l’eau et que l’on augmente la température progressivement, elle « s’adapte »… jusqu’à mourir ébouillantée.

Être vigilant et mesurer objectivement les symptômes

Trop souvent, la personne risquant un burn-out se décide trop tard à consulter, quand l’épuisement est déjà bien installé, voire quand elle a dépassé ses limites et été arrêtée par la force des choses.

Cela n’est guère surprenant quand on sait que les personnes les plus à risque sont souvent des professionnels très impliqués, qui persévèrent même dans des contextes très difficiles ou psychologiquement toxiques pour eux. Bien souvent, il faut avoir vu dans son entourage la violence du retour à la réalité pour comprendre ce à quoi on s’expose. Dans la salle d’attente d’un médecin, deux patientes discutent de leur situation : elles sont toutes les deux en mi-temps thérapeutique. L’une explique qu’elle a toujours été dure à la tâche, « pas du genre à se faire arrêter, même malade  »…  L’autre hoche la tête et commente avec regret : « La santé, on n’en a qu’une. » Dans les couloirs d’une entreprise, cette réalité paraît parfois lointaine, effacée par une réalité « virtuelle », un monde dans lequel il faudrait être « au top » à tout prix, où nous n’aurions pas de limite. Si la combativité et l’implication sont de formidables qualités, elles ont aussi besoin d’être équilibrées par le discernement et la bienveillance envers soi. Écoutez votre corps ! Et si vous avez le moindre doute sur votre état, faîtes le test suivant (Inventaire de Maslach) :

http://www.masef.com/scores/burnoutsyndromeechellembi.htm

Un bilan médical est un bon moyen d’évaluer plus objectivement où l’on en est sur le plan physique. Parfois ce sont des résultats d’examens sanguins qui tirent la sonnette d’alarme et permettent de se rendre compte que le risque n’est pas « imaginaire », que l’on inflige à notre corps des efforts qui excèdent ses capacités.

Parfois aussi c’est l’entourage qui nous « réveille » en nous mettant face à nos sautes d’humeur, notre manque d’énergie, nos insomnies… encore faut-il savoir entendre les messages de nos proches, ou ceux des professionnels de santé, et ne pas prendre ces avertissements à la légère. Réaliser ce qui se passe et s’ouvrir à de nouvelles possibilités d’action est la première étape vers un mieux-être.

Anticiper et réagir aux premiers signes

Vous allez bien mais vous souhaitez mettre en œuvre des mesures préventives, ou vous avez identifié de premiers symptômes d’épuisement et vous vous demandez comment réagir. Bravo ! Avec une réelle motivation, il est possible d’avancer vers des solutions efficaces. Elles ne seront ni magiques, ni idéales à première vue, mais elles seront fonctionnelles et vous permettront de préserver votre santé au lieu d’attendre une amélioration utopique de votre contexte de travail (« si seulement mon manager s’en allait ») ou un rétablissement illusoire en quelques jours (« je me reposerai pendant les prochaines vacances », « ça ira mieux après une semaine d’arrêt »…).

Des solutions préventives existent, qu’il s’agisse de changements dans son travail, dans l’organisation du quotidien, de techniques pour mieux gérer ses difficultés… en général, on commence par faire plus attention à son équilibre de vie : s’accorder des temps de repos et de loisir suffisants, avoir des activités et des relations épanouissantes en-dehors du travail.

Les solutions passent aussi par une prise de recul, un lâcher-prise vis-à-vis des exigences parfois intenables auxquelles on se plie. Accepter ses limites (sans pour autant renoncer à ses valeurs professionnelles) et les respecter, relativiser, savoir où sont nos vraies priorités…

On peut aussi tenter de changer certains aspects de notre travail pour retrouver du plaisir et réduire les contraintes. Doser la difficulté, doser nos efforts de manière plus réaliste dans une journée, une semaine, retrouver le sens de ce que l’on fait… mais aussi s’affirmer davantage, mettre des limites, apprendre à gérer différemment nos réactions à un contexte difficile (gérer sa colère, sa peur, ne pas se dévaloriser, ni culpabiliser…).

Parfois, on décidera de changer de travail voire de métier, après peut-être un bilan de compétences. Chaque situation est particulière et les actions à entreprendre dépendent de multiples facteurs. N’hésitez pas à vous faire aider dans votre questionnement par des professionnels variés : médecin, conseiller en orientation, psychologue, RH… tous peuvent prendre part à une évolution positive prenant en compte la spécificité de vos besoins et de votre contexte.

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